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Soirée Perles rares vampiriques à la Cinémathèque
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Festival Gerardmer 2021

En ce début d’année 2021, les amoureux du festival de Gerardmer n’auront pas ressenti les froidures de la cité des Vosges, bien installés dans leur canapé ou devant leur écran d’ordinateur pour assister à cette édition virtuelle. Un choix par défaut et sans rapports humains inhérent à ce genre de manifestation. La bonne nouvelle est que les curieux ont pu se délecter à volonté d’une programmation (dont j’avais déjà eu le plaisir d’en voir une bonne partie l’an dernier) qui a sacré du Grand Prix le bien méchant Possessor de Brandon Cronenberg. Teddy (Ludovic et Zoran Boukherma) et La Nuée (Just Philippot) recevant respectivement le Prix du Jury (et du Jury Jeunes) pour ce film de loup-garou, et les Prix de la Critique et du Public pour le second. Petit retour commenté sur quatre films de cette nouvelle édition.

 

The Dark and the Wicked – USA – 2019 – Bryan Bertino

Hors compétition

 

Pitch : Louise et Michael se rendent à la ferme familiale où ils ont grandi, au chevet de leur père mourant. Leur mère, en proie à des crises de démence, est convaincue qu’une force extérieure s’est insinuée dans leurs vies. 

 

Bryan Bertino continue de tracer son chemin dans le paysage cinématographique de l’horreur. Révélé par l’home invasion The Strangers en 2008, le réalisateur et scénariste de Mokingbird et The Monster, deux productions sympathiques, débarque avec son dernier essai, de loin son œuvre la plus aboutie à mon sens. Dès le départ, l’atmosphère s’avère tendue dans cette vieille demeure perdue au milieu de la campagne texane où une vieille femme (Julie Oliver-Touchstone) assiste son mari mourant dans ses derniers instants. Très vite, et sans effet de manche superflu, le spectateur ressent cette tension palpable grâce à la mise en scène et le travail sur le son. Pas besoin de montrer l’inconnu, il est là tapi quelque part derrière les murs à attendre. L’arrivée des enfants, Louise (Marin Ireland vue dans The Empty Man) et son frère Michael (Michael Abbott Jr., The Death of Dick Long), amplifie ce sentiment de malaise qui gagne toute la famille.

Au son lointain des hurlements des loups, la nuit se pare d’un manteau de terreur et une indicible chape de plomb se referme sur la maisonnée. Le mal rôde et semble vouloir entrer dans le nid familial de façon insidieuse en faisant perdre la tête aux occupants à coups d’hallucinations. Ainsi, la vieille dame se mutile comme possédée lors d’une séquence choc. Le début de plusieurs nuits d’angoisse pour Louise et Michael, confrontés malgré eux à des manifestations surnaturelles, voire sataniques dont l’objectif du malin serait de happer l’âme de leur père à l’agonie. Mêmes les chèvres sont sur le qui-vive, rassemblées et effrayées dans leur enclos protégé par une barrière faite de bouteilles de verre pour prévenir des intrus.

Porté par une caméra lente et immersive, Bertino instaure un climat latent d’inquiétude. Une ombre dans un coin ou un bruit de porte se révèle terrifiant dans ce film avare en musique et dans lequel la mise en scène provoque la peur, avec l’appui de quelques jumpscares mais sans abus, pour un modèle de terreur nocturne et invisible. Avec sa photographie magnifique et son casting remarquable (les réactions des personnages sont réalistes), The Dark and the Wicked convoque pas mal de références, de L’Exorciste avec un prêtre assez énigmatique (Xander Berkeley) au récent The Relic de Natalie Erika James sur la question du deuil, voire au film de maison hantée par un esprit démoniaque source d’illusions cauchemardesques.

Au final, le réalisateur passe le cut avec succès dans ce long-métrage brillant à la mise en image à la fois simple et efficace où une simple lumière qui s’allume toute seule est capable d’instiller un effroi cathartique avant un final plus démonstratif perclus de séquences sanglantes voire glauques à l’instar du sort réservé à Michael. On pourra peut-être reprocher au film quelques zones d’ombres mais ce serait mégoter sur la qualité de l’ensemble, tenu jusqu’au bout dans son histoire et dans sa capacité à faire dresser les poils.

 

4,5/6

 

 

Anything for Jackson – Canada – 2020 - Justin G. Dyck

En compétition

 

Pitch : Henry, obstétricien, et son épouse Audrey viennent de perdre Jackson, leur unique petit-fils, dans un accident de voiture, et sont accablés de chagrin. Leur croyance sataniste leur enseigne qu’il est possible de faire revivre le défunt à condition de lui trouver un hôte adéquat. Ils décident alors de kidnapper une patiente enceinte avec la ferme intention de réaliser un "exorcisme inversé". 

 

Spécialisé dans les téléfilms de noël, Anything for Jackson constitue la première incursion de Justin G. Dyck dans le fantastique avec ce récit d’un couple essayant de ressusciter leur petit-fils disparu dans un accident de voiture grâce à un rite satanique. Pour cela, ils enlèvent une femme enceinte (Konstantina Mantelos) et pratiquent sur elle une cérémonie occulte où ils invoquent la Bête afin que l’âme du défunt intègre le petit corps en gestation. Papy et mamie qui convoquent la magie noire, ce n’est pas de tout repos surtout qu’Audrey (Sheila McCarthy, Le Jour d’après) utilise un vieux grimoire d’incantations comme un livre de cuisine, aidé par un débonnaire Henry (Julian Richings, Urban Legend) qui essaie de colmater les fuites engendrées par l’appel à une force démoniaque.

Malgré son atmosphère anxiogène (une femme enceinte attachée à un lit ou la présence du mal dans la maison), Anything for Jackson évolue dans un climat de comédie sous-jacent entretenu par le rapport très particulier au satanisme dans ce couple au-dessus de tout soupçon. Il faut dire que leur club des adeptes des croix inversées ne fait pas très peur même si certains semblent convaincus des effets dispensés par ces séances encapuchonnées à invoquer le cornu. Pourtant, il semblerait que cela fonctionne. Audrey est capable de faire revivre un corbeau mais elle a du mal à maîtriser les forces qu’elle a déclenchées.

Bon an mal an, le long-métrage tient la cadence et alterne entre séquences horrifiques où les forces démoniaques s’introduisent dans la maison et un humour salvateur source de situations itératives où les protagonistes ont la fâcheuse tendance à se mutiler voire à se suicider, possédés par qui vous savez. Certes, le film est perclus de clichés du genre avec le rouquin sataniste convaincu qui écoute du hard métal (Josh Cruddas, The Silencing) et vit chez sa mère l’invitant régulièrement à descendre pour manger ou l’apparition d’un monstre à long bec lors de l’invocation démoniaque.

Il ne manque donc pas grand-chose pour que le film bascule du bon côté de la barrière, naviguant en permanence sur le fil ténu de la crédibilité. En dépit de ses défauts et d’un scénario pas toujours maîtrisé dans son équilibre horreur/comédie, il est néanmoins sauvé par une interprétation sans faille et quelques moments de franche réussite à l’image de l’inspectrice qui revient inlassablement se suicider dans la chambre à coucher.

 

3,5/6

 

 

Butchers – Canada – 2020 - Adrian Langley

Hors compétition

 

Pitch : Une famille de bouchers sadiques a élu domicile dans l’arrière-pays, loin du monde et du regard des hommes. En toutes saisons, hivers glacials comme étés caniculaires, tous ceux qui croisent leur chemin sont des victimes potentielles…

 

Les chemins balisés par le séminal Massacre à la Tronçonneuse n’ont eu de cesse de faire des émules dans le cinéma d’horreur. Avec Butchers, Adrian Langley, à la fois réalisateur, technicien et peintre, investit à nouveau le secteur du redneck disgracieux et adepte de la machette. Mais, là où d’autres décidèrent de copier le film de Tobe Hooper en version « bas du front » (la saga Wrong Turn pour ne pas la nommer), Langley apporte sa pierre à l’édifice du slasher campagnard en construisant un long-métrage, certes très classique, mais non dénué d’intérêt.

Finalement, que restera-t ’il de ce film débutant, comme souvent, par l’agression d’un couple sur une route de campagne déserte ? Des boyaux et du sang ? pas vraiment, car comme son illustre prédécesseur, Butchers est plutôt avare en gore craspec au regard du sujet et de son entame où la copine du pauvre gars qui a pris une pelle dans la gueule finit entravée face à ses bourreaux lui promettant de bien s’occuper d’elle. Quelques mois plus tard, notre kidnappée dort dans une cage comme un animal de basse-cour enceinte jusqu’aux yeux. Le ton est donné même la suite du film s’avère un peu plus intéressante.

D’autant que quatre jeunes en vadrouille, en panne de voiture dans le coin, sont obligés de faire appel aux services du garagiste Owen Watson (Simon Phillips, le Santa Claus de Once Upon a Time at Christmas) et de son frère simplet Oswald (Michael Swatton), nos amis kidnappeurs du début. Fatalement, la rencontre entre les gens de la ville et de la campagne n’est pas sans faire d’étincelles et les "cous rouges" ont visiblement l’habitude de dessouder du randonneur égaré, en plus de conserver à l’abri des regards une créature dont seuls les borborygmes rauques jaillissent de derrière les murs où sont enfermés nos jeunes en goguette. A ce petit jeu, Owen s’amuse de la situation et crée une réelle empathie pour son personnage, n’hésitant pas à deviser le cinéma d’horreur ou à se moquer des réseaux sociaux. Presque un philosophe en quelque sorte. D’ailleurs, son frère pas fini du ciboulot lit du Shakespeare à sa détenue pour lui faire passer le temps.

Rien de révolutionnaire au final, mais le film se laisse suivre avec plaisir grâce à un rythme soutenu et une mise en image tout à fait correcte. Mieux encore, les jeunes ne sont pas si idiots et moins caricaturaux qu’à l’ordinaire, leurs réactions étant plutôt cohérentes. L’ensemble du casting s’en tire d’ailleurs avec les honneurs au milieu d’un scénario simple et efficace, sans outrance gore pour masquer un manque d’ambition et des enjeux limités. Certes, le sang gicle par instants mais les découpages intempestifs sont souvent pratiqués hors champs à l’instar de The Texas Chainsaw Massacre. Bref, Butchers tient la rampe malgré une dernière bobine plus convenue et l’apparition du cousin de la famille à la gueule difforme. On ne se refait pas dans la campagne de l’autre côté de l’océan.

 

4/6

 

 

Les Animaux Anonymes –- France – 2020 - Baptiste Rouveure

Hors compétition

 

Pitch : Le rapport de force entre l'homme et l'animal a changé. Dans une campagne reculée, toute rencontre avec le dominant peut devenir hostile.

 

Avec ce film forcément militant pour la cause animale, Baptiste Rouveure dénonce le traitement des animaux par le biais du fantastique en inversant littéralement les rôles. Les humains sont à la place des bêtes et ces dernières mènent la danse avec la même détermination. S’ils possèdent un corps d’humanoïde, cette nouvelle classe dominante revêt des têtes d’animaux (cerf, taureau ou chien) et communique uniquement par grognements. Dans le camp adverse, les humains subissent le sort des animaux d’abattoir, pour la chasse ou pour participer à des combats fratricides.

Quelque part entre La Ferme des Animaux et La Planète des Singes, le film de Baptiste Rouveure est une expérience assez étrange. Dépourvu de dialogues, le scénario reste très minimaliste, suivant le parcours d’un homme retrouvé attaché à un arbre par une chaîne et d’autres personnages mutiques envoyés à l’abattoir sous le regard de leurs bourreaux. D’une durée limitée à un peu plus d’une heure, Les Animaux Anonymes ne développe pas une histoire réellement cohérente, même si la fin du métrage recolle quelque peu les morceaux, et joue sur les sons et les sensations ressenties par ces hommes et femmes dans la peau d’animaux au final maltraités.

Doté d’une photographie et de maquillage surprenant et réussis, le film fait face aux carences de son script (et certainement de son budget) en misant au maximum sur l’atmosphère et une caméra immersive pour certaines séquences plutôt réussies. Dommage que l’ensemble soit limité et ankylosé de fondus au noir mettant en évidence ce manque de liant, ne générant qu’une dénonciation finalement très manichéenne du bien-être animal. L’allégorie du rapport homme/animal n’est pas très subtil et tourne vite à vide en faisant passer les humains pour de véritables monstres, sans apporter aucune nuance. C’est sans doute volontaire pour cette œuvre somme toute forte mais plus proche d’un court que d’un moyen ou long-métrage.

 

3/6

 

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Commentaires: 2
  • #1

    titi70 (lundi, 22 février 2021 15:49)

    De ce que j'ai pu lire, un drôle de festival dans une drôle d'année. En espérant que les choses s'arrangent pour 2022. Je profite de mon passage pour te donner l'adresse de mon nouveau blog : http://chronicorapido.canalblog.com/.

  • #2

    Roggy (lundi, 22 février 2021 19:54)

    Oui, comme tu dis, c'était très étrange cette année...