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Dernier jour, palmarès et bilan de l'Etrange festival 2020

Dernier jour à l'Etrange festival avec trois films pour terminer en beauté cette édition 2020. On débute par la comédie taïwanaise de zombies Get the Hell Out de I. Fan Wang, avant d'enchaîner sur un retour de flamme assez extraordinaire, Larmes de Clown de Victor Sjöström, accompagné au piano par Serge Bromberg, et de clôturer le festival avec L'Homme du Président, thriller politique du coréen Min-ho Woo.

 

 

GET THE HELL OUT – Zombiefolie - Taïwan – 2020 - I.-Fan Wang

En compétition

 

Pitch : Le parlement taïwanais devient plus dangereux que jamais lorsqu’un virus transforme les politiciens en zombies, avides, comme chacun sait, de dévorer les citoyens...

 

Prémonitoire, le bandeau diffusé en forme de boutade avant de débuter le film : « Un mauvais film ne vous fait souffrir que 90 minutes. Un mauvais gouvernement vous fait souffrir durant quatre ans ». Cette phrase résume à elle seule la teneur du premier long-métrage de I. Fan Wang. Une pochade sous adrénaline avec un fond politique dilué dans cette comédie zombie se voulant drôle mais touchant rarement la cible de l'humour pour un public occidental. Un constat récurrent pour ce genre de productions asiatiques à destination d'une audience habituée à ce style loufoque et pétaradant.

Une chose est sûre, Get the Hell Out ne fait pas dans la subtilité et balance rapidement son casting de joyeux drilles dans l'arène du parlement taïwanais où les politiciens se déchirent pour la prochaine élection. Une récurrence dans certaines enceintes politiques avec en plus l'apparition d'une virus zombie transformant cette assemblée en violents bouffeurs de chair fraîche. Le sang gicle à gros geyser sur l'ensemble du casting tandis que les protagonistes s'organisent pour s'échapper de ce chaos devenu un enfer. Située avant l'invasion zombie, la première demi-heure est étrangement très bavarde entre humour décalée et négociations d'une politicienne licenciée obligeant le gardien de sécurité, qu'elle juge coupable de cet acte, à se présenter à sa place afin de promouvoir ses idées.

Juste un prétexte pour satisfaire les envies d'un scénario, clôt désormais aux murs du parlement, à partir dans tous les sens visuels entre le manga délirant et le splastick. L'ensemble du casting crie et gesticule avec véhémence au milieu d'une armée de zomblards déchaînés face à des survivants plus cabotineurs les uns que les autres. C'est le lot de ces comédies défouloirs à la caméra virevoltante et aux amplis à fond. Les acteurs sont coiffés et habillés avec des couleurs vivent, font des grimaces et balancent des vannes à vitesse grand V afin de rendre des comptes au cahier des charges de l'entreprise. Sur la durée règlementaire, Get the Hell Out s'avère un calvaire à suivre, l'humour restant très confidentiel malgré quelques saillies politiques (on l'imagine) et des références à la pop culture ou les jeux vidéo. Bref, l'annonce en début de film n'était pas si innocente après réflexions.

 

2,5/6

 

 

LARMES DE CLOWN – Trite Pierrot - USA – 1924 - Victor Sjöström

Retour de flamme

 

Pitch : Trahi par sa femme et son ami qui lui volent le fruit de ses travaux au moment où il s’apprêtait à révéler des découvertes sur les origines de l’Homme, le scientifique Paul Beaumont se retire du monde. Il refait sa vie dans un cirque où sous le nom de He il devient le clown qui reçoit des gifles de tous les autres clowns. Il s’éprend d’une écuyère, elle-même amoureuse d’un autre homme, mais que son père promet déjà à un mystérieux prétendant...

 

Cette séance de Retour de flamme était très émouvante, à la fois le film en lui-même et pour la présentation énamourée et passionnante de Serge Bromberg en ouverture. D'autant plus que le célèbre producteur, réalisateur (et j'en passe) était derrière le piano pour accompagner cette œuvre muette et magnifique qui a profité d'une restauration. Quel bonheur de se frotter au cinéma des origines avec ce long-métrage tourné en 1924 par le Suédois Victor Sjöström (La Charrette Fantôme, Le Vent), dont c'est ici la deuxième réalisation hollywoodienne. C'est aussi le premier film produit par la fameuse MGM et la toute première apparition rugissante du mythique lion en ouverture. Le félin à crinière aura également un rôle à la fin du film.

Soutenu par les notes inspirées de Serge Bromberg, Larmes de Clown (He Who gets Slapped en VO, titre plus proche de la réalité de l'intrigue) est une merveille visuelle à la puissance évocatrice impressionnante et à l'émotion palpable malgré l'absence de paroles. Comme bien souvent dans ces productions du début du cinématographe, le film se présente comme une tragédie transfigurée par le personnage d'un clown interprété par l'immense Lon Chaney à la carrière démesurée, à l'image de ses transformations physiques du Fantôme de l'Opéra, ou sa prestation dans L'Inconnu. Dans le film de Victor Sjöström, si l'acteur est grimé initialement en scientifique (Paul Beaumont), il revêt les habits de clown dans la deuxième partie seulement fardé par de la poudre blanche. Toute l'émotion est véhiculée par son regard et sa mélancolie indescriptible.

Larmes de Clown est un drame à l'état pur. Paul Beaumont est humilié face à ses pairs pour s'être fait volé ses découvertes sur l'origine de l'Homme (et sa femme par la même occasion) par le Baron Regnard (Marc McDermott). Dépité et rejeté, Beaumont se mue en clown (He) et intègre un cirque pour devenir la tête de turc risible des spectateurs. Lors de son numéro, il est giflé (d'où le titre en version originale) par 60 autres clowns sous les éclats de rire sadiques d'un parterre heureux de le voir se relever avant d'être enterré en grandes pompes. Chaque soir, il revit tel un Sisyphe le calvaire de sa vie précédente avec ce sourire forcé rappelant celui de L'Homme qui rit du roman de Victor Hugo. Le numéro reste un des meilleurs moments du film avec un malaise accentué grâce à la mise en scène extraordinaire de Victor Sjöström.

Les malheurs de Beaumont ne sont pourtant pas terminés. Il s'amourache d'une jeune écuyère Consuelo (Norma Shearer, Marie-Antoinette) convoitée également par Bezano (John Gilbert, Les nuits du désert), mais le méchant Baron rentre dans l'histoire en demandant en mariage la belle Consuelo. Plus qu'un triangle amoureux, cette nouvelle désillusion est encore un coup de massue pour le clown, humilié une deuxième fois par son ennemi juré. En plaçant l'intrigue dans un cirque, Victor Sjöström accentue l'allégorie d'une humanité cruelle, prête à se moquer d'un être qui chute sous les coups des cris et des gifles de ses congénères. L'humanité est un cirque à ciel ouvert où les destins se font et se défont sous les vivats sadiques de la foule et les trahisons. Portée par une mise en image tout en symbole, Larmes de clown explose par sa modernité, son jeu d'acteurs particulièrement en retenue et cette beauté élégiaque des grandes œuvres dramatiques au destin forcément funèbre. He décide de se venger et le dernier rire sera le plus terrible mais cela en fait un film merveilleux.

 

5/6

 

 

L'HOMME DU PRESIDENT – Koreagate – Corée-du-Sud – 2020 - Min-ho Woo

Film de clôture

 

Pitch : En 1979, le président Park, tyrannique et corrompu, dirige la Corée d’une main de fer, contrôlant notamment la KCIA, l’agence d’information la plus redoutable. Son directeur Kim Gyu-pyeong est promis au plus bel avenir. Pendant ce temps un ancien directeur exilé aux États-Unis s’apprête en plein “Koreagate” à révéler des secrets à la CIA. La situation est prête à exploser…

 

Avec L'Homme du Président (Namsanui Bujangdeul en VO), Min-ho Woo (Inside Men) prend les chemins bien connus du thriller politique à rouages. On pense forcément à tout un pan du cinéma américain comme Les Hommes du Président d'Alan J. Pakula en 1976, mais aussi au récent The Spy Gone North (Yoon Jong-bin, 2018) dénonçant déjà les agissements du Gouvernement coréen. Ce nouveau long-métrage s'attaque à la véritable histoire et à la chute du Président coréen de la fin des années 70. L'Homme du Président possède ainsi tous les atours du film d'espionnage à l'ancienne doublé d'une intrusion dans les arcanes du pouvoir.

Le long-métrage est un formidable face à face entre le directeur Kim Gyu-pyeong de la KCIA (l'Agence de renseignements locale) interprété par le sémillant Byung-hun Lee (Destruction Finale) et le Président Park (Sung-min Lee, The Spy Gone North) avec au milieu un autre conseiller Kwak (Hee-joon Lee, Pandémie) en trublion colérique et imprévisible, conseiller du Président toujours prêt à envoyer les chars sur les manifestants. De ce magma de personnages hauts-placés, Min-ho Woo construit un film dense et précis combinant tous les archétypes et les codes des films de manipulation à l'instar de cet ancien directeur en mouchard ayant écrit un récit dénonçant les agissements des autorités en place.

Adossée à une très belle reconstitution historique des décors aux costumes, L'Homme du Président est un thriller politique habile revenant sur un fait divers finalement peu connu au regard par exemple du Watergate mais à la portée très important pour le destin de la Corée. La mise en scène se met ainsi au service du récit avec ses rouages complexes mais accessibles, parcourue de séquences d'action réussies, à l'image du passage située à Paris et dans la campagne française. De la belle ouvrage façonnée avec une précision d'orfèvre permettant au spectateur de s'immiscer dans l'antre du pouvoir. Qu'il soit coréen ou non, il fait froid dans le dos.

 

4/6

 

Palmarès de l'Etrange Festival 2020

COMPÉTITION INTERNATIONALE LONG MÉTRAGE :

Grand Prix Canal + nouveau genre : TOMIRIS d'Akan Satayev

Prix du public : KAJILLIONAIRE de Miranda July

 

COMPÉTITION INTERNATIONALE COURT MÉTRAGE :

Grand Prix Canal + : AMANDINE de Juan Carlos Mostaza

Prix du public : NUAGE de Joséphine Darcy Hopkins

 

Bilan personnel de l'Etrange Festival 2020

Avec 17 500 spectateurs sur 12 jours, l'Etrange Festival 2020 est une immense réussite au vu de la situation actuelle et restera dans les annales comme une oasis dans le ciel tourmenté mondial. Tout s'est bien passé car l'ensemble des festivaliers ont globalement joué le jeu d'une édition sous le joug d'une pandémie mais marquée par une programmation de qualité malgré la difficulté (on veut bien le croire) pour projeter de nouvelles œuvres intéressantes. Entre les Studios frileux pour dévoiler leurs nouveaux films, en attendant la tenue de festivals plus prestigieux, et des productions non finalisées à temps, la sélection s'est resserrée sur moins de projections mais avec une qualité générale particulièrement remarquable. Sans doute l'avenir du festival, privilégier la qualité à la quantité.

Côté sélection, il y avait de tout à voir pour l'amateur de cinéma avec une ouverture sympathique Tomiris (Prix du jury Canal+) tout en chevauchée sauvage pour cet action movie légendaire au féminin et le thriller politique L'Homme du Président en clôture réussie. Difficile en faire de faire la différence entre la sélection officielle et Mondovision dont les œuvres sont finalement interchangeables. N'ayant pas pu voir Kajillionaire de Miranda July, je ne peux me prononcer sur un long-métrage qui a visiblement emballé les festivaliers. En revanche, gros coup de cœur pour Relic de l'australienne Natalie Erika James certainement à suivre et pour Amulet, première réalisation de la comédienne Romola Garai. A noter d'ailleurs que la sélection comportait un grand nombre de films réalisés par des femmes avec des résultats de bonne qualité augurant un renouveau salvateur pour le cinéma de genre.

Sur les 22 longs-métrages que j'ai eu la chance de visionner, pas de réelles déceptions. Je retiens le loup-garou pyrénéen Teddy de Ludovic et Zoran Boukherma, petite œuvre horrifique française réussie, et le déstabilisant mais très beau The Trouble with Being Born de l'autrichienne Sandra Wollner au sujet controversé. Et puis, la très bonne surprise Fried Barry et son acteur principal halluciné pour cette errance hallucinante de SF gore et bis du Sud-Africain Ryan Kruger. Sans oublier la séance Retour de flamme avec Larmes de Clown présentée et accompagnée au piano par Serge Bromberg.

 

A l'année prochaine pour une 27e édition !

 

Roggy.

 

 

Bilan chiffré personnel et subjectif :

 

RELIC

5

LARMES DE CLOWN

5

FRIED BARRY

4,5

POSSESSOR

4

TOMIRIS

4

Shakespeare's sh*tstorm

4

GRIMM RE-EDIT

4

TEDDY

4

DESTINATION FINALE

4

AMULET

4

The Trouble with Being Born

4

L'HOMME DU PRESIDENT

4

BLACK JOURNAL

3,5

A DARK DARK MAN

3,5

SPUTNIK

3,5

BEAUTY WATER

3,5

HUNTED

3

IMPETIGORE

3

TEZUKA'S BARBARA

3

LE COUTEAU SOUS LA GORGE

2,5

SPREE

2,5

GET THE HELL OUT

2,5

 

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Commentaires: 2
  • #1

    alice in oliver (mardi, 15 septembre 2020 18:24)

    ça fait une bonne moyenne au niveau des notes, plutôt un bon cru et pas vraiment de déceptions au final

  • #2

    Roggy (mercredi, 16 septembre 2020 08:01)

    Au vu de la situation, la programmation était réussie et ce fut une plutôt année en effet.