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7e Jour à l'Etrange Festival

Si certains se sont reposés le 7e jour, votre serviteur a encore pris son bâton de pèlerin pour trois nouvelles projections. Du thriller shooté au smartphone et autres caméras de surveillance Spree de l'américain Eugene Kotlyarenko, au blockbuster catastrophe coréen Destruction Finale des réalisateurs Byung-seo Kim et Hae-jun Lee, pour finir avec le film horrifique anglais Amulet de Romola Garai. Presque un sacerdoce.

 

SPREE – Uber Hit - USA – 2020 - Eugene Kotlyarenko

En compétition

 

Pitch : Chauffeur “Spree”, une application à la Uber, désespéré d’avoir si peu de followers sur sa chaîne, Kurt vient de trouver une solution un peu particulière pour devenir viral. l’anonymat ne sera bientôt qu’un mauvais souvenir...

 

Au petit jeu de la connerie contemporaine, il serait fort à parier que les réseaux sociaux et leurs cohortes de followers obtiendraient sans conteste la Palme d'Or de la bêtise. C'est grosso modo la description donnée par le réalisateur Eugene Kotlyarenko dans son film suivant au plus près un chauffeur dans sa voiture. Spree relate l'existence désœuvrée d'un jeune homme Kurt (Joe Keery, la série Stranger Things) qui, pour être suivis sur la toile, décide de tuer des anonymes choisis grâce à une application de taxis (Spree) et de se filmer pour devenir populaire.

Sur ce postulat dans l'air du temps, Eugene Kotlyarenko construit un film qui n'en est pas vraiment un dans la mesure où il s'appuie exclusivement sur les caméras placées dans la voiture ou celles des téléphones portables utilisés par l'ensemble des personnages, véritable troisième main d'une génération obligée de vivre par procuration et de se montrer aux autres pour exister. Sur le papier, le sujet est intéressant mais à l'écran on en prend plein la gueule d'images saccadées et de sons trop bruyant. Une idée finalement exacte de ces applications éphémères ne servant qu'à produire du contenu assourdissant la plupart du temps vide de sens.

Dans sa quête de reconnaissance et de gloire, Kurt rencontre des personnages aussi égocentriques et détestables que lui. Du suprémaciste blanc au beau gosse dragueur lourdingue en passant par l'humoriste Jesse Adams (Sasheer Zamata), Spree montre une jeunesse antipathique, seulement intéressée par le paraître et le voyeurisme au fur et à mesure où Kurt commet des meurtres juste pour être suivi par ses followers, finalement tout autant complices derrière leurs écrans. On a déjà vu ça dans pas mal de films d'horreur récents mais le principe est ici amplifié par le concept du long-métrage où on reconnaît David Arquette (la saga Scream) en DJ foireux et père de Kurt.

Sur la durée, Spree abrutit le spectateur avec son désir d'en faire trop pour dénoncer à grands coups de sabots (et en se permettant de juger arbitrairement le bon du méchant) une situation irrémédiable car le jeune chauffeur ne peut aller qu'à sa perte au bout d'une nuit de tuerie, de méfaits et d'accidents de la route. Les images se succèdent à vitesse stroboscopique accompagnées d'un bruit sourd représentant bien la vie dissolue de ce sociopathe en mal de vrais contacts. Le film ne prend ainsi jamais de recul sur lui-même et multiplie les split-screen jusqu'à l'étouffement du spectateur. Dommage d'en arriver là pour un film qui navigue entre Nightcrawler et Searching. Deux bons exemples de ce qu'on aurait pu être Spree s'il avait réussi son pari visuel.

 

2,5/6

 

 

DESTRUCTION FINALE - Boom - Corée-du-Sud – 2019 - Byung-seo Kim et Hae-jun Lee

 

En compétition

 

Pitch : Lorsqu’en Corée du Nord, à la frontière de la Chine, un volcan du mont Paektu entre en éruption, c’est la péninsule entière qui se trouve menacée. Alors que tous les renforts sont sur le pied de guerre, une seconde éruption menace. Kang Bong-rae l’avait pourtant prédit: sismologue rejeté par ses pairs pour ses avertissements fantaisistes, le voilà rappelé de toute urgence.

 

Qu'on se le dise, les Américains n'ont pas le monopole du gros blockbuster décérébré et fun. Les Coréens sont capables de les imiter avec une innocence et un détachement qui confinent au divertissement d'une soirée de septembre encore chaude. Bref, Destruction finale est un spectacle permanent basé sur l'éruption d'un volcan à l'origine de plusieurs tremblements de terre sur toute la péninsule du pays du matin calme. D'ailleurs, les réalisateurs ne s'embarrent pas très longtemps d'une présentation sommaire et passent rapidement à la chute d'immeubles au milieu d'un chaos pétaradant.

Byung-seo Kim et Hae-jun Lee, scénaristes et réalisateurs (Des nouilles aux haricots noirs) passent d'entrée la surmultipliée en suivant un soldat qui doit être démobilisé (Ha Jung-woo, Tunnel, Mademoiselle) zigzaguant entre les voitures et le sol s’entrouvrant sous les roues de son véhicule. Tout réalisme est déjà enterré et partie en fumée de cette production de film catastrophe juste là pour l'entertainment avec un humour permanent entretenu par les soldats envoyés sur sauver l'humanité. On n'est pas loin d'Independance Day ou Armageddon à ceci près que l'ensemble tient la route visuellement et n'ennuie jamais malgré les situations désespérées où s'embarquent les héros.

Les enjeux sont rapidement connus, empêcher une nouvelle irruption en plaçant une bombe équivalent à une explosion atomique au cœur du volcan. Mené par un sismologue rigolo et forcément génial (Ma Dongseok, Dernier Train pour Busan), le plan des Coréens est contrarié à la fois par des Américains vindicatifs, les Chinois et évidemment les Coréens du Nord. C'est en effet chez Kim Jong Un que nos héros sont censés récupérés les têtes nucléaires pour les faire exploser au bon endroit. Même si rien n'est crédible, Destruction finale se fait généreux en séquences d'action, la troupe de soldats véritables pieds-nickelés en guise de sauveurs du monde est irrésistible grâce à un humour complètement décalé au vu de la situation tragique et du chaos ambiant.

Con mais fun comme dirait le spectateur habitué à ce cinéma popcorn réglé sur mesure où le méchant traître coréen du Nord, l'excellent Lee Byung-hun (A Bittersweet Life, J’ai rencontré le Diable) en fait des tonnes et joue les trublions avant de s'associer avec les envahisseurs venus du Sud pour les aider à récupérer les charges explosives. Globalement, le film est bourré de moments de bravoure shootés à l'adrénaline et de séquences de comédie pour un long-métrage grandiloquent et cliché où les mouchoirs sont de sortie. Comme d'hab, un des personnages principaux se sacrifie pour l'humanité après avoir trouvé la rédemption. C'est beau comme du Roland Emmerich ou du Michael Bay avec un climax spectaculaire situé dans les entrailles du volcan dont l'arrivée, en évitant la myriade de rochers en feu avec les têtes nucléaires dépassant du coffre de la voiture (!), s'apparente comme deux gouttes d'eau aux hobbits s'approchant de la montagne du Mordor dont le but commun aux deux films serait de jeter l'anneau pour les sauver tous. Mémorable.

 

4/6

 

 

AMULET – Pendatif maudit - Royaume-Uni – 2020 - Romola Garai

 

En compétition

 

Pitch : Ex-soldat devenu SDF à Londres, Tomaz est abordé par une bonne sœur qui lui propose de l’héberger. Dans un vieux pavillon qui a besoin d’être rafraîchi, il tiendra compagnie à Magda, jeune femme un peu sauvage qui s’occupe de sa mère mourante. À mesure que le duo s’apprivoise, l’angoisse s’installe dans une demeure où les murs recèlent leurs sombres secrets mais n’étouffent pas les hurlements réguliers de la vieille dame.

 

Pour son premier long-métrage, l'actrice Romola Garai, connue pour son travail chez François Ozon (Angel) ou dans Reviens-moi, Les Suffragettes surprend son monde avec cette histoire très étrange nourrie à la double temporalité d'un récit sombre et immersif. A l'image de la scène d'ouverture située dans une forêt indéterminée, où Tomaz (Alec Secareanu, Seule la Terre) est un soldat solitaire gardant une frontière presque invisible, Amulet laisse planer le doute sur la nature de son sujet. Le scénario reviendra sur cette période initiale sous forme de flashback venant alimenter le long-métrage de sa torpeur ambiante.

Débarrassé de son uniforme et affublé d'une barbe, Tomaz est devenu un étranger rejeté vivant dans des squats à Londres avant la proposition de la sœur Claire (Imelda Staunton, Vera Drake) d'un hébergement dans une vieille maison délabrée où vit Magda Carla Juri, Brimstone) et sa mère agonisante, cloîtrée au grenier dont les cris de douleur résonnent dans toute la demeure. La réalisatrice utilise ainsi le background personnel de Tomaz, pour l'instant inconnu et visible en parallèle du récit principal, afin de le combiner à sa nouvelle vie au centre d'une famille très particulière entre une fille aimante maltraitée par son mère recluse et enfermée à double tour comme un animal dangereux.

Sans tomber dans le drame social mais en utilisant ce malaise ambiant, Amulet garde longtemps sa part de suspens et convoque aussi bien l'horreur suggestive que les visions organiques dans une maison aux murs noircis et aux meubles crasseux. Le personnage de Tomaz commence à perdre pied dans cet environnement hostile et bizarre, surtout à partir du moment où il découvre des indices dissimulés dans cette antre et s'approche de la vieille femme. Ses angoisses personnelles ressurgissent de plus belles et se fondent dans le relationnel de la mère et de la fille à la fois fusionnel et agressif. Par petites touches, le film se déploie et livre certains secrets sans jamais apporter toutes les réponses à l'instar de la découverte d'une petite ailée inattendue, signifiant par là-même le basculement vers le fantastique.

Pour son premier film, Romola Garai réussit donc son pari du mystère grâce à un scénario bien ficelé dont le puzzle se reconstitue en partie sur la fin même si toutes les clés ne sont pas accessibles. La dernière bobine empreinte ainsi le chemin de l'horreur viscérale et poétique que n'aurait pas renié un David Cronenberg laissant le spectateur imaginer la conclusion au travers du twist final, révélant la triste destinée du personnage principal. Il dévoile également le passé trouble de Tomaz comme un miroir à la propre expérience de la réalisatrice confrontée dans sa jeunesse à un certain Harvey Westein. Une très bonne surprise.

 

4/6

 

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