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2e jour à l'Etrange festival

 

Alors que la journée avait débuté très mollement avec Avant que nous disparaissions du japonais Kiyoshi Kurosawa, suivi du thriller anglais The marker de Justin Edgar et du philippin Purgatoryo de Roderick Cabrido, l'Etrange festival a dévoilé sa première pépite dont nous n'attendions rien au départ avec Lowlife de l'américain Ryan Prows.

 

AVANT QUE NOUS DISPARAISSIONS – Invasion E.T. – Japon – 2017 – Kiyoshi Kurosawa

 

En compétition

 

Pitch : Alors que Narumi et son mari Shinji traversent une mauvaise passe, Shinji disparaît soudainement et revient quelques jours plus tard, complètement transformé. Il semble être devenu un homme différent, tendre et attentionné.

 

Kiyoshi Kurosawa est certainement un des plus grands réalisateurs japonais contemporains (Cure, Kairo, Vers l'autre rive). Pourtant, Avant que nous disparaissions ne figure pas dans la liste de ses chefs-d’œuvre et reste assez sobre dans la mise en scène même si on y retrouve ses thèmes de prédilection la mort, l'amour et l'oubli. Le film débute par l'assassinat d'une famille par une jeune fille sans trop savoir pourquoi. En fait, c'est une entité extraterrestre a pris son corps pour préparer une invasion. Comme on est chez Kurosawa, avec certainement un budget limité, cette invasion se fera très lentement et sans vaisseau spatial. Spielberg et Michael Bay peuvent aller se rhabiller.

Le film se veut néanmoins ambitieux dans sa narration en suivant plusieurs personnages en parallèle dont le journaliste Sakurai se retrouvant au cœur de l'action et devient le "guide" d'un des extraterrestres. En effet, ces derniers ne connaissent pas l'espèce humaine et ont besoin de suiveurs pour les aider dans leur objectif. L'idée du film est que ces E.T. volent littéralement les émotions aux humains, d'un simple toucher, comme la liberté ou l'amour pour nous comprendre. En se les appropriant, nos congénères sont déboussolés et deviennent des légumes inadaptés à la vie. Dis comme ça, on serait presque dans une nouvelle version de L'invasion des profanateurs de sépultures sauf qu'on est chez Kurosawa et son fantastique intimiste où avec quelques plans tout simples, il parvient à créer une atmosphère étrange.

C'est aussi le revers de la médaille dans la mesure où sa narration s'avère très lente et répétitive. Il faut s'accrocher lors des péripéties avec les habitants et les rencontres avec les autorités cherchant à contrecarrer cette invasion grâce à des agents repoussés par notre trio d'aliens en goguette dans des scènes d'action limitées. Sans effets particuliers et dans des décors très cheap, le film trahit son manque de moyens et ronronne doucement. On a peine à s'intéresser aux personnages même si le couple formé par Narumi et Shinji s'avère touchant dans sa tentative de recoller les morceaux. Surtout que la frontière de la niaiserie et des bons sentiments est frôlée à plusieurs reprises.

Heureusement, Kurosawa ponctue son film de séquences de comédie assez réussies du fait de la perte de sentiment comme celle du patron acariâtre jusqu'à une dernière bobine partant plus dans l'action science-fictionnelle (le terrain de jeu est comme souvent une carrière abandonnée) tandis que l'invasion se précise. On aurait aimé que le film se termine sur cette vision d'un ciel s'ouvrant sur l'enfer et des météorites en feu à l'image de la fin de Take shelter. Or, le réalisateur colle encore d'autres scènes explicatives et inutiles au regard de la durée du film (2h10). Avant que nous disparaissions est ainsi trop long et dépourvu d'émotions, une des qualités premières de Kiyoshi Kurosawa. Peut-être qu'à force de multiplier les projets sans interruption, il se perd dans son propre cinéma et commence à tourner en rond avec ses obsessions qui lui sont chères.

 

3,5/6

 

THE MARKER – Polar – UK – 2017 – Justin Edgar

En compétition

 

Pitch : Après une condamnation pour homicide involontaire, Marley sort de prison. Dévoré par la culpabilité, il cherche à retrouver Cristina, la fille de la femme qu'il a tuée. Mais Cristina, désormais adolescente, s’est mise dans une situation délicate en côtoyant les mauvaises personnes.

 

Nanti d'un budget de moins d'un million de livres, Justin Edgar (We Are the Freaks) bâtit un polar âpre et violent situé dans la ville de Birmingham, typique des productions minimalistes outre-manche de ces dernières années. Dans la veine d'un Hyena de Gerard Johnson, le film débute par un drame provoqué par les hommes de mains de Brendan Doyle (excellent John Hannah vu notamment dans La momie). Marley (Frederick Schmidt, aperçu récemment dans le western horrifique Brimstone) tue ainsi sauvagement une jeune femme roumaine Ana (Ana Alaru, Inferno) qui tentait de protéger sa fille Cristina. Le ton est donné avec cette descente de malfrats dans un squat pour une sombre histoire d'argent entre gangs.

Avec sa carrure de déménageur et son aspect taiseux, Frederick Schmidt porte le film sur ses épaules en composant un personnage proche de Tom Hardy ou de Matthias Schoenaerts dans Bullhead, notamment lors de son passage en prison où il subit les conséquences de son acte. A sa sortie, il souhaite retrouver la jeune orpheline Cristina pour s'occuper d'elle. Il faut dire que depuis les événements, Marley ressasse cette nuit tragique et aperçoit quotidiennement Ana dans sa cellule, le hantant jour et nuit. Si on se doute que cette vision est due à son traumatisme, le fait qu'Ana l'accompagne partout, même après sa sortie (on la voit le surveiller par une fenêtre ou elle est présente dans sa voiture), entretiendra le doute sur sa réelle existence fantomatique jusqu'à la fin.

Justin Edgar situe son film dans une Angleterre où les pauvres, surtout les jeunes filles en fugue, sont ramassés dans les rues pour entretenir des réseaux de prostitution et satisfaire des hommes riches. Des clichés dans lesquels le réalisateur s'engouffre et où on découvre un véritable système de corruption et de manipulations des services sociaux pour faire disparaître les mineurs arrivés à l'âge de 16 ans. Si le film s'avère limité par son budget, le casting reste solide et la violence frontale crée une atmosphère lugubre qui pourrait nous renvoyer aux exactions commises dans le 8 millimètres de Joel Schumacher.

Au plus près de ses personnages (on pense rapidement et sans le comparer au mythique Pusher), le film suit la dérive d'un homme pour retrouver une jeune femme perdue dans le milieu de la drogue et des petits voyous. Une odyssée violente où les humiliations verbales et physiques poussent Marley dans ses retranchements (y compris son passé avec sa mère junkie) jusqu'à provoquer des réactions extrêmes et brutales. Rien de nouveau donc sous le ciel sombre et pluvieux anglais aux frontières du fantastique et par moments de la caricature.

 

3,5/6

 

PURGATORYO – Défunts préparés – Philippine – 2016 - Roderick Cabrido

 

En compétition

 

Pitch : Appréhendé en train de commettre un larcin, Ilyong est froidement descendu par la police. À la morgue, son corps fera l’objet d’un curieux trafic dirigé par Violet…

 

Les Philippines, c'est un peu l'autre pays du cinéma. Peu connu chez nous, il foisonne de productions ne franchissant que rarement ses frontières. C'est le cas du film de Roderick Cabrido (Children's Show, Tuos) avec cette histoire située presque exclusivement dans une morgue où On-On (Kristoffer King) et Dyograd (Jess Mendoza) préparent les corps pour le compte de Violet (Bernardo Bernardo), homosexuel déguisé en femme qui aime bien se délecter des charmes des jeunes hommes l'entourant.

Dans un décor minimaliste, on suit au plus près cette intervention morbide en caméra subjective comme si on était à la place du mort. De longues minutes de préparation à l'image du film prenant son temps pour disséquer chaque opération et voir ses personnages, un peu bras cassés, travailler dans des conditions sanitaires limites. En fait, Violet avec la complicité du policier Jojo (Arnold Reyes) utilise les corps à disposition pour organiser de fausses funérailles et récupérer de l'argent de la communauté. Un petit business lucratif permettant à tout ce petit monde de vivoter entre la morgue et les parties de cartes organisées dans la rue voisine.

Le problème du film est qu'il est très répétitif et, une fois ces enjeux très simples exposés, ne raconte pas grand chose. Roderick Cabrido se complait à montrer une humanité peu glorieuse où la prostitution fait loi avec une police corrompue. Dans ce tableau très sombre des Philippines, On-On et Dyograd tentent de trouver un amour impossible entre frustration sexuelle et désir enfouis sous l'alcool et les cigarettes. Si le film s'avère restreint en terme narratif, il se fait cru dans les propos et la façon de montrer les cadavres. Pire, il tombe dans la nécrophilie quand On-On se tape le cadavre d'une jeune femme parce qu'il n'a pas pu se satisfaire avec sa petite amie. La scène est frontale et le réalisateur prend son temps avant de reculer sa caméra et passer derrière des rideaux amplifiant encore plus l'horreur de la situation.

Au-delà de cette séquence finalement gratuite, Purgatoryo s'appréhende comme une coquille vide, le spectateur ne comprenant pas où le réalisateur veut en venir avec ces pauvres diables pas trop finauds, juste mus par leurs instincts primitifs. Le film semble sans rédemption et même l'humour présent dans quelques séquences (une femme découvre le cadavre de son mari pleuré par une autre ou le cercueil déplacé pour éviter une descente de police) ne relève pas l'ensemble oscillant entre le film d'auteur, le drame social, le thriller et l'horreur nécrophile.

 

2/6

 

LOWLIFE – Catcheur énervé – USA – 2017 - Ryan Prows

 

En compétition et en présence du réalisateur et de l'actrice Nicki Micheaux

 

Pitch : L'improbable épopée d’un lutteur mexicain, d’un toxicomane et d’un ancien taulard sur fond d’un trafic d’organes qui tourne mal.

 

Il aura fallu attendre cinq films pour tomber sur la première pépite de ce 23e Etrange festival. Un premier film dont on attendait rien, mis en boîte à Los Angeles avec une équipe de tournage réduite composée de 6 personnes en tout et pour tout (dixit les invités). Et pourtant, cette absence de moyens ne se ressent aucunement à l'écran. Au contraire, on a l'impression d'être face à un film au budget conséquent tant la mise en scène est maîtrisée avec un arc narratif dont pourrait s'inspirer beaucoup de scénaristes de longs-métrages américains. Le film est en fait découpé en quatre chapitres reprenant la même situation avec des angles différents en fonction des protagonistes.

Dès la première séquence voyant un policier déloger des immigrés mexicains d'un motel sous les yeux de sa gérante Crystal (Nicki Micheaux, vue dans pas mal de séries comme Six feet under ou Animal kingdom) on est sous le charme et la scène suivante confirme encore plus ce ressenti. Ramenés dans un entrepôt, le chef d'un gang Teddy (Mark Burnham, le flic déjanté de Wrong cops) se charge, avec la complicité du policier, de ces immigrés en les tuant et les découpant pour récupérer puis revendre leurs organes tandis que la plus jeune est enfermée dans une cave afin de servir d'objet sexuel. Très vite, le réalisateur plante un décor sordide à coups de séquences sanglantes de démembrement dans une réalité et un destin tragique de clandestins mexicains sans jamais tomber dans un pathos ou une iconographie vulgaire.

Ryan Prows crée en fait un monde à la fois crédible à la réalité froide dans un climat où l'absurde le dispute à la comédie. Au sein de cette cour des miracles, on distingue le personnage d'El Monstruo (Ricardo Adam Zarate), catcheur incarnant normalement le défenseur des opprimés mais en fait homme de main de Teddy. Un personnage haut en couleur revêtu en permanence de son masque de combat qui vénère son père comme un Dieu mais a du mal à prendre sa suite car il se trouve trop petit. Présenté ici comme un super-héros à la Hulk, il cristallise le lien entre l'Amérique et les clandestins mexicains cherchant à s'offrir une nouvelle vie. Quand il est énervé, son sang ne fait qu'un tour et déchaîne une violence d'ouragan qu'on ne voit pas en action mais dont on découvre le résultat peu après.

Lowlife possède un charme et une grâce indéfinissable sans doute dû au talent du réalisateur pour placer sa caméra, (le script resserré sur les personnages est efficace) et raconter une histoire somme toute simple liée à un trafic d'organes avec des personnages attachants. D'autant plus que le casting est au diapason. On peut d'ailleurs en extraire la très bonne prestation de Nicki Micheaux en mère courage essayant de sauver son mari malade en lui trouvant un rein et le toujours excellent Mark Burnham dans son rôle de chef de voyous un peu décalé. A l'image de tous les autres protagonistes et notamment dans le dernier segment le duo formé par Keith (Shaye Ogbonna, Boomerang Kids) et Randy (Jon Oswald, Mata Hari). Deux petites frappes de circonstance chargés de récupérer Kaylee (Santana Dempsey) objet de convoitise du film pour son rein et pour le fils d'El Monstruo qu'elle porte, formant un attelage hilarant du fait du tatouage très particulier de Randy à sa sortie de prison.

La force du film est d'osciller avec bonheur et dextérité entre le drame, le film de genre et la comédie jubilatoire. Ryan Prows se permet même des séquence très gores de têtes explosées par un fusil ou à mains nues grâce à des effets visuels extrêmement réalistes. Entre le film policier et la comédie horrifique à la Santo, Lowlife s'impose d'ores et déjà comme un classique de la comédie décalée faisant furieusement penser aux premiers longs-métrages de Quentin Tarantino pour le découpage des scènes et l'outrance de certaines séquences. Mais en beaucoup mieux et en moins cynique car on rit avec les personnages à l'empathie exacerbée. Il ne faut pas trop en dire et découvrir ce film en restant vierge de certaines situations pour l'apprécier encore mieux car il mérite toute notre attention. Une vraie découverte à voir de toute urgence !

 

5/6

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Commentaires: 2
  • #1

    Alice In Oliver (samedi, 09 septembre 2017 12:27)

    Mince, le pich de PURGATORYO avait plutôt l'air alléchant, mais une déception au final. Dans le genre horreur nécrophile, j'apprécie bcp Blue Holocaust, un des rares bons films de Joe d'Amato

  • #2

    Roggy (samedi, 09 septembre 2017 12:32)

    Ca n'a vraiment rien à voir en fait. Le résumé est trompeur, c'est plutôt un drame social avec, certes, une scène de nécrophilie.